vendredi 11 avril 2014

LEÇONS D’HARMONIE


LEÇONS D’HARMONIE


Réalisé par Emir Baigazin
Kazakhstan

En salle le 26 mars 2014 (durée 1H44min)




Aslan est un adolescent vivant dans un village du Kazakhstan avec sa grand-mère. Isolé et perpétuellement brimé par ses camarades, dont un gang de racketteurs mené par le caïd Bolat. Aslan se replie sur lui-même, il est d’une intelligence perverse et expérimente la chimie seul chez lui, il souffre apparemment d’un perfectionnisme effronté. Il semble en désaccord complet avec son environnement dont il détient cependant tous les codes.

Une leçon d’harmonie ? En musique, l'harmonie renvoie aux simultanéités sonores et plus précisément aux accords. Dans la théorie de la musique occidentale, l'harmonie étudie la construction des accords, les principes qui les gouvernent et leurs enchaînements.

Dans le drame d’Emir Baigazin, c’est une leçon de composition qui nous est imposée, l’enchaînement des événements depuis la première scène nous plonge dans un suspens qui pourrait devenir insoutenable bien que régulé par la lenteur de la construction.
La caméra est un témoin, au même niveau que le spectateur, des dérives du film. Violence, drame, crime, tentative de suicide, la suggestion est un travail primordial pour Emir Baigazin, l’ellipse devient une fascination.
Mais là ou une réalité est filmée crûment, on assiste à une très inquiétante leçon d’harmonie de la modernité. Dans une importante opposition entre des cours d’histoire ou un professeur fait un portrait de Gandhi, la morale de l’islam et les smartphones et baskets nike des collégiens vivant pour la plupart dans la misère.

La leçon d’harmonie c’est bien Aslan qui nous la dispense, le personnage nous immerge dans un semi-rêve d’images parfaites et nous laisse construire un thriller qui n’en est pas un, manipulation silencieuse et gracieuse, perturbante leçon de cinéma.




Capucine Lageat

Les Journées du Code Créatif à Stereolux, Nantes


Les Journées du Code Créatif à Stereolux, Nantes


Les 30 et 31 janvier 2014, le Stereolux (Nantes) a organisé les Journées du Code Créatif, consacrées au langage de programmation "Processing".
Le logiciel Processing est l'un des principaux environnements de programmation permettant la génération d’œuvres multimédia sur ordinateur : Design génératif, arts numériques, visualisation des données.
Lorsque l'on entre dans l'exposition ‘Processing’ on est tout de suite frappé par le peu d'œuvres en relief exposées, une seule œuvre interactive ‘Murmur’ et quelques écrans diffusant en continu des créations vidéo du moment, délivrées du web le temps de cette exposition.

L'œuvre interactive ‘Murmur’ est « une prothèse architecture » qui permet un dialogue entre les passants et le mur sur lequel elle est connectée. L'installation simule le déplacement des ondes sonores de la voix du spectateur qui construit un pont lumineux entre le monde physique et les mondes virtuels.  Il y a un effet magique, un mystère sur la manière dont les ondes sonores se déplacent pour se transformer chaque fois de manière différente à la surface du mur. ‘Murmur’ se concentre sur ce mouvement, créant ainsi un dialogue conventionnel entre le public et le mur, matérialisant le déplacement des ondes sonores. ‘Murmur’ détourne les notions de vitesse, d’espace et de temps.
Les vidéos présentées varient en contenu, on a pu voir des danseurs faits de particules se désintégrer au grè de leurs propres mouvements (Cédric Kiefer), des univers 3D s'enroulant sur eux-mêmes, ainsi que des lignes tendues dans l'espace qui réagissent aux sons et se transforment jusqu’ à former des motifs psychédéliques (Daniel Sierra).
Processing s'adapte très bien à divers domaines de création (son, mouvements etc…) ceci permettant de créer des œuvres interactives avec une multitude de possibilités.
Le spectateur se trouve transporté et happé par des univers virtuels qui éblouissent par leur complexité et leur fluidité. On se prend à rêver de programmer des animations de toutes sortes. On tire aussi une grande satisfaction à imaginer le travail du programmeur et les obstacles rencontrés dans cet environnement rigide et froid pour aboutir à une production fluide et scintillante.

Processing est en somme un outil de programmation sur lequel il faut désormais compter et qui, si l'on si met, peut permettre de réaliser des productions intéressantes.


Eliot Lee

Jérôme Zonder , AU VILLAGE


Jérôme Zonder , AU VILLAGE
Du samedi 8 mars au Dimanche 11 mai 2014, entrée libre
Le lieu unique, Nantes


Tout d'abord attirée par ce village, me voilà dès le début immergée dans un conte avec cette sensation due aux jeux d'échelle, d'appartenir à l'espace, d'être un corps inclus dans l'image. On entre dans une maison aux traits d'un dessin d'enfant et observe, les yeux plein d'admiration devant la technique, le fruit de plusieurs séries. Cette pièce donne le ton, on sait dès à présent que Jérôme Zonder va nous parler de l'enfance, du cinéma et aussi de l'Histoire.
Tout un tas de petites histoires donc, savamment mélangées et qui nous aspirent, par le choc violent des sujets (le sexe, la mort la guerre), ainsi que la mise en scène. On se sent presque dans un cocon blanc puis on est malmené par la force du trait, du noir. L'artiste utilise plusieurs styles dans ses dessins, du travail perfectionniste du trait au dessin naïf et grinçant. On passe de l'un à l'autre, voire des deux en même temps sans pour autant perdre le fil du récit. Et puis j'ai été fascinée par la taille de certaines œuvres. Je me suis mise à imaginer les gestes, peut-être même un dispositif. Pour le grand portrait au doigt et à la poudre de graphite et fusain je voyais presque l'artiste reculer pour avoir une idée de ce que ça donnait de loin. On imagine Zonder en train de faire, de s'installer dans l'espace, de créer un endroit dans le lieu. Puis les dessins du village nous ramènent à la fiction, de l'église à la forêt on déambule.
Voyage doux amer qui renvoie aux images grinçantes des contes et de l'Histoire, cette exposition nous balade de réalités en fictions, ancrées dans notre mémoire.
Marilou Matschulat


Liens:

The Happy Show- Stefan Sagmeister, La Gaîté Lyrique


The Happy Show- Stefan Sagmeister, La Gaîté Lyrique

Du 28.11.13 au 9.03.14
Gaîté Lyrique
3 bis rue Papin 75 003 Paris

Commissaire d'exposition : Claudia Gould
Exposition co-produite par l'Institute of Contempory Art, Université de Pennsylvanie


En allant à une exposition de Stefan Sagmeister, je m'attendais à voir de grandes affiches d'albums de rock comme les Rolling Stones, de Lou Reed ou autres mais ce ne fut pas le cas. Au lieu de ça, j'ai eu une mission à relever : « Déposez une pièce dans la boîte transparente, vous rendrez quelqu'un heureux ». Je l'ai fait mais personne ne s'est servi, pourtant trois mômes ont incité les visiteurs à prendre de l'argent « Allez, prenez ! Prenez ! ». Sans succès. Je suis sûre que ça aurait marché avec des billets.

Pour moi cette exposition ressemble à un échange entre le spectateur et l'artiste, même si les visiteurs ne se prêtent pas tous au jeu. Des murs jaunes (couleur de la banane) remplis de textes avec quelques ratures, écrits à la main au marqueur noir, nous montrent des études, des questions, des statistiques, des dessins sur le bonheur. Tout comme l'artiste nous avons rempli les murs des escaliers avec des messages et des dessins. Un petit écriteau nous incitait à manger les bonbons au gingembre préférés (qui sont dégoûtants) de Stefan Sagmeister. Les vidéos mêlaient animations graphiques, typographies, beaucoup d’éclats, de coulures et de couleurs. Des documentaires montraient Stefan Segmeister en train de faire ses exercices d'entraînement au bonheur comme offrir à chaque passante qu'il croisait dans la rue une rose. En parlant d'entraînement, un vélo était mis à notre disposition, plus on pédalait et plus les typographies en néons affichaient des messages.

Je ne sais pas si le bonheur peut s'acquérir de cette manière-là mais je peux dire que c'était une exposition assez amusante et que la plupart des visiteurs étaient enthousiastes à l'idée de faire toutes ces activités.

OWUSU Wendy






Staalplaat Soundsystem SALE AWAY Locus Solus


Staalplaat Soundsystem SALE AWAY Locus Solus
du 14 au 19 janvier 2014, entrée libre
Le lieu unique, Nantes

Prévenue en bas des escaliers de la puissance sonore, je les monte courageusement, avec le rythme cardiaque presque réglé aux pulsations sonores. Arrivée dans la salle je ne peux pas m'empêcher de sourire, impressionnée par la puissance de tous ces objets réglés à l'unisson, et le sol qui vibre très fort (les lacets de ma chaussure se sont défaits par vibration quand même). Après un long coup d'œil sur les grosses caisses, les ventilateurs et au loin les disqueuses, j'essaye de comprendre de quoi me parlaient les gens de l'accueil. En fait cette installation est une œuvre interactive, on vous indique un numéro de téléphone, si vous l'appelez vous êtes (un peu) le maître du jeu. Vous avez le choix entre trois compositions (à écouter sur le lien SoundCloud) et suivant si vous avez cliqué "1", "2" ou "3" vous entendrez des sons différents. Ce n'est pas tout, à votre guise, vous pouvez enlever les aspirateurs, les machines dans les caisses...
Contrairement à ce que je m'étais imaginé, ça n'a rien à voir avec de la cacophonie, c'est rythmé, musical. Du coup la magie opère, je regarde différemment mon aspirateur, et n'importe quel objet émettant du bruit d'ailleurs. J'ai d'ailleurs repensé à cette vidéo Foli (rythme), de Thomas Roebers et Floris Leeuwenberg: http://www.youtube.com/watch?v=lVPLIuBy9CY qui interroge, comme le fait cette installation tous nos gestes, nos actes, et nous renvoie à leur musicalité.


Matschulat Marilou

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