mardi 6 janvier 2015

« Idiot ! Parce que nous aurions dû nous aimer »

Mercredi 19, Jeudi 20 et Vendredi 21 Novembre 

Metteur en scène : Vincent Macaigne 
Titre : « Idiot ! Parce que nous aurions dû nous aimer » inspiré du roman « L’idiot» de Fiodor Dostoïevski



Inspiré par « L’idiot » de Fiodor Dostoïevski qui dans son roman expose les difficultés de la vérité et de la sincérité dans les cercles mondains, le spectacle en retient ses lignes de forces.
La mise en scène de Vincent Macaigne mêle tous les registres en allant du grotesque au lyrique, du tragique au dérisoire, de la violence à la douceur. 
Le plateau en deviendrait une « installation » avec ces boues noires qui tombent des murs, ces détritus en pagaille, ces corps qui trébuchent, le mur qui s’écroule … C’est un bric-à-brac scénique.
L’épuisement est comme le thème principal, la souillure, la hargne et le désespoir, face aux cris, aux hurlements qui s’intensifient à chaque parole mais le cri n’est pas dit comme une hystérie mais comme une urgence à dire, le spectateur s’en va ou encaisse ! C’est sans dire que Vincent Macaigne partage la rage de Fiodor Dostoïevski, la douleur des corps et des âmes, ce manifeste interroge sur l’état dégénératif d’une société qui se veut corrompue. 
Il adopte un point de vue philosophique d'après lequel le monde et l'existence humaine sont dénués de tout sens et de toutes valeurs. Un miroir de l’humanité désireuse de croire aux changements présentés dans un état d’exaltation violente et d’égarement menant aux pires excès mais dans une perpétuelle volonté de réagir et de sauver. 
Tous les êtres sont salis sauf «  l’idiot», ce prince naïf qui est pourtant le seul cœur pur.
L’urgence et le besoin apparaissent dans l’esthétique démesurée du début à la fin, il y avait une vision lourde dans la scénographie. La pièce n’accordait aucun repos tant dans le visuel que dans le dialogue. Si je devais parler de la démesure des cris, l’excessivité du jeu des acteurs face à la panique des spectateurs, on pourrait s’y sentir soit effrayé, soit attiré par cette rage qui les animaient, trouble psychique d’un grand mal être. Une mise en scène maximaliste qui met au dépourvu est difficilement supportable. Ces positionnements conflictuels, surjoués par les uns et les autres n'aident pas à comprendre quelles sont les solutions possibles pour sortir de cette situation et ne permettent pas d'arriver à trouver rapidement un consensus. La musique rock qui était très subversive accompagnait bien les propos. 
Pour conclure, nous sortons de ce spectacle avec l’idée dérangeante que nous sommes nous aussi responsables de la décadence de cette société et avec l’envie de lire cet auteur certainement indispensable à la pensée contemporaine...
C’est tout mais c’est déjà pas mal et c’est sans doute le principal.




Anais Chaussinand 

TIMO TOOTS « Z »

TIMO TOOTS « Z »

Du 6 déc au 4 janv. Au lieu unique. 1er étage.
Mar > Sam : 14h – 19h
Dim : 15h - 19h

« Z », c'est une grande pièce plongée dans l'obscurité. Un espace occupé par des objets connus de tous, mais dont les formes et les effets ne vous sont dévoilés que si vous êtes équipé de l'outil adapté, qui vous sera bien entendu remis à l'entrée. Vous voilà donc pourvu d'une curieuse machine sur roues, doté d'un écran relié à une caméra. Cette machine vous paraît lourde, de facture douteuse, mais elle sera néanmoins votre seule amie durant votre pérégrination. Quelques pas suffisent au premier étonnement : vous voyez à travers l'écran des choses que vous ne voyez pas à l’œil nu. Une première question se pose donc sur le fonctionnement de ladite machine. La vision nocturne est donc au programme, mais lorsque vous vous rapprochez de l'objet vous ne voyez rien, hormis du noir, ce noir si pesant. Quelle technologie permet cela ? Vous décidez de continuer dans la pièce, bien décidé à résoudre ce mystère en allant chercher des indices au centre de cette dernière. C'est à ce moment qu'un flot de lumière envahi votre écran. C'est à n'y rien comprendre, un coup d’œil dans la pièce vous  prouve bien que rien n'est allumé, que seule l'obscurité persiste. Après avoir remis votre santé mentale en question, vous vous approchez des objets et y décelez quelques indices intéressants, mais ne résolvant en rien le problème : comment cela est-il possible ? Toots utilise donc une technologie particulière pour nous montrer quelque chose. Mais quoi ? La question vous taraude et à cet instant vous voyez sur l'écran quelque chose de nouveau, quelque chose que vous n'avez pas en face de vous. Une main devant la caméra vous le confirme, vous suspectez un bug, et vous voyez finalement une personne inconnue devant vous, mais l'image est déjà revenue sur la pièce. Curieux. C'est donc avec prudence et amusement que vous continuez votre voyage, laissant de coté les phénomènes surnaturels donc vous avez été témoin. Vous comprenez assez vite que Timo Toots propose, grâce à ces images flottantes, une vision alternative du multimédia et de la connexion. Vous venez de vivre « différemment » cet instant dans cette pièce si étrange. Vous sortez de la salle, rangez la machine. C'est enfin le moment ; la seule décision que vous aurez à prendre durant cette expérience : demander toutes les explications (qui vous seront livrées), ou repartir comme vous êtes entré, perplexe.


Victor COURCIER

Présenter L'irreprésentable

Présenter L'irreprésentable
HAB Galerie, Nantes
29 novembre 2014 - 22 février 2015
De 13h à 18h du mercredi au vendredi et jusqu'à 19h le weekend
Commissariat : Alice Fleury et Blandine Chavanne

La thématique proposée fait à l’évidence appel à la notion de représentation sans doute un des questionnements majeurs dans l’histoire de l’art. La divergence des réponses proposées par les trois artistes, qui peut être déroutante, révèle la complexité d’une telle problématique. Comment présenter l’irreprésentable ?
Pour Jean-Jacques Lebel, le ton est engagé. L’irreprésentable figure ici les menaces indicibles et continuelles des dérives brutales de l’humanité. Le point d’articulation est sans doute le grand tableau antifasciste fonctionnant en écho avec Le labyrinthe et Hitler et Eva Braun cinéastes. C’est la répétition insidieuse de l’Histoire qui est révélée : les totalitarismes de la Seconde Guerre mondiale, la guerre d’Algérie, les exactions commises par l’armée américaine en Afghanistan… La confrontation aux œuvres se veut brutale, sourde et combative.
Dans la proposition d’Alain Fleischer, l’irreprésentable dévoile plutôt ce qui échappe à la perception physique et à la reconstitution mentale. Ses travaux évoquent les réflexions sur la photographie de Walter Benjamin  qui révèle entre autres les difficultés à appréhender la relation entre espace et temps. Comment comprendre que l’espace d’une image a son temps propre ou inversement, que chaque instant a son espace physique propre ?  
Dans Théâtre pour la main, un hommage au Marquis de Sade, Danielle Schirman propose une mise en scène du désir sans frontière. La vidéo est issue d'un livre d'illustrations animé réalisé par l'artiste elle-même contenant des saynètes manipulables par le spectateur évoquant la société libertine du XVIIIème. Dans la vidéo cette possibilité n'est plus offerte au spectateur, les images sont imposées... La présentation du désir est également évoquée dans les propositions d'Alain Fleischer "Ecran sensible" et de Jean Jacques Lebel de même "Les avatars de Vénus".

Maxime Charbonnier

André Robillard, L’autre de l’art

« Une claque dans ma tronche »
LaM, Villeneuve d’Ascq, André Robillard in exposition L’autre de l’art 
J’avais les yeux dans le brouillard avant d’arriver au LAM. En entrant dans ce dernier, mon état s’est entièrement transformé : c’était comme une grande claque dans ma tronche.
L’art brut m’a toujours convaincu que les fous et les enfants ont la plus grande sincérité artistique. Dans ce musée, par cet esprit infantile, natif, volcanique et poétique, je me suis retrouvé charmé par ce voyage dans cette exposition.
Si je devais citer l’exemple le plus marquant et le plus éloquent, ce serait, sans aucun doute, pour ma part, le travail d’André Robillard. Ses œuvres sont marquantes par leurs libertés créatrices notamment au niveau des couleurs très surprenantes. Habituellement j’ai peur de mêler certaines pigmentations, il existe une sorte de mur qui m’empêche de céder à l’utilisation du nuancier dans mes productions et sujets. Ce mur, je l’ai retrouvé brisé et démoli lors de ma contemplation des œuvres de Robillard. C’est sans aucun doute ce que je recherche le plus lors d’une visite d’exposition : l’exaltation vers l’inconnu, quelque chose que je ne connais pas et que je ne sais pas faire.
Bien évidemment, on ne peut qu’admirer le travail de Robillard quant à la forme et l’essence même de l’iconographie qu’il nous impose : ces armes qu’il représente dans leurs lignes claires, apparaissent et deviennent des objets comiques et touchants. Il y a une proximité au hasard dans ses choix de matériaux, ce qui apporte une dimension parfois absurde à ses productions. Les armes, dans leurs aspects froids, s’imprègnent d’une chaleur dans la façon dont il les compose grâce à des objets de toutes sortes. J’ai été agréablement surpris, lors de ma promenade culturelle, de sa vision colorée autant dans ses sculptures que dans ses dessins.
Enfin, le LAM a véritablement réussi à créer en moi un sentiment de découverte et d’émerveillement tant dans son organisation de l’espace, libre et légère, que dans la présentation des cycles et artistes. 


Mathias Brosset